naissance — les cris de vie, hurlements vivaces et voraces. mais elle ne te désire pas, pourtant, elle demande à te voir. l’hésitation est palpable dans l’air, la question en suspens sur les lèvres des infirmiers.ères. elle te donne le colostrum et il aurait pu y avoir un déclic à ce moment-là, peut-être qu’il y en a eu un ; celui où elle a choisi de rester une inconnue dans ta vie, un x.
la suite tu la connais : Hestia t’a béni, faisant de toi son fils et Charles t’a pris dans ses bras parce que tu gazouillais. c’est là qu’elle l’a choisi pour être ton père, comblant les x et y en devenant tes parents.
enfance & adelphes — c’est mouvementé et clairement pas de tout repos, mais Charles semble s'en sortir ; malgré tout, il n'avait pas prévu une visite d’Hestia à peine plus d’un an et demi après ton adoption, avec un autre marmot dans les bras. tu ne t’en souviens pas réellement, Sasha, mais elle a amené Pia (13 août 1998) ; petite sœur adorée. quasiment dix mois plus tard, c’est une nouvelle tornade qui entre dans votre quotidien à tous les trois : Miko (31 mai 1999). c’est flou, mais tu la revois avec son sourire discret, son voile et la sensation de sa main dans ta tignasse, Sasha.
« maman. » prononcé avec toute la conviction du monde. Charles jongle entre son travail à l’hôpital et vous, vous qui rendez fous les nounous, qui se demandent comment on peut prendre la décision d’adopter seul trois enfants aussi jeunes. il aurait bien voulu répondre
« demandez à la déesse qu’iels ont pour mère. » mais il se contentait de sourire. l’histoire du soir était le moment le plus sacré de la journée, entre mythes, divinités, monstres et héros. Charles a eu une amourette, Susan, c’était son prénom. il s’est dit que peut-être… mais ça n’a pas duré ni fonctionné, que ça soit avec les enfants ou avec lui.
tu te souviens de l'arrivée de Zach (22 décembre 2001) , Sasha. un cadeau un peu avant noël, un peu avant tes cinq ans. course dans les jupons de maman et admiration devant la bouille du nouveau petit frère ; le dernier. tu le comprends à l’expression des traits de papa et tu boudes, Sasha, après qu’elle soit partie. claquant la porte de ta chambre, le dos appuyé contre celle-ci, Charles assis de l’autre côté. tu rouspètes que maintenant vous n’allez plus la voir, que vous ne la voyez que quand elle amène un autre bébé ; il te dit que tu as raison.
« — mais elle est toujours avec toi, dans ton cœur.
— pour de vrai ?
— oui, pose ta main dessus, ferme les yeux et pense à elle très fort. »il a toujours su comment s’y prendre, avec vous toustes. même quand Miko a défoncé le micro-onde, ou quand Pia accrochait vos affaires en haut des arbres… même quand Zach hurlait comme un animal enragé et toi qui les assistais dans leurs frasques. Charles été fait pour ça, fait pour être votre papa.
2008 — il a toujours insisté pour l’école, même si t’étais le dernier de la classe en mathématiques et en anglais. tu t’en sortais en sport et en musique, même en arts plastiques, en histoire aussi mais clairement pas en géographie… les sciences, juste quand il y avait un potentiel explosif. c’était pas facile, Charles a souvent été convoqué, mais il l’a toujours pris avec calme. toi, tu voulais juste aller au camp.
« l’école c’est nul, moi j'veux être un héros comme Hercule ! » il t’a dit
« à onze ans, quand tu auras fini l’école élémentaire. » tu avais l’impression que c’était si loin, Sasha, la vérité c’est que c’est vite arrivé ; trop vite au goût de Charles. il t’a amené cet été là, mi-juillet 2008 et tu ne l’as pas vu, mais il a pleuré quand tu t’es tourné. l’enfant de l’époque a clamé que c’étaient les meilleures vacances de toute sa vie, puis l’automne est arrivé… et là, tu t’es mis à chouiner, Sasha. la maison te manquait. Pia, Miko, Zach et papa. larmes que tu étouffais dans ton doudou, une peluche Tigrou.
2009 - 2010 — tu t’es habitué à Nausikaa, à cette vie avec tes demi-siblings et tes cousins de chez Hermès ; fier de toustes les présenter à ta sœur et à ton frère. t’es encore qu’un gamin, Sasha, tu ne prends pas encore tout ça au sérieux ; un môme qui découvre le début de l’adolescence en même temps et du premier béguin. c’est Ace Ackerley, fils d’Athéna qui te fait chanceler et bégayer, Sasha. pendant longtemps tu vas juste te contenter de baver de loin, Vega qui essuie la commissure de tes lèvres. tu ne sais pas comment t’y prendre : te pointer devant lui et vider ton sac alors qu’il ne doit même pas savoir que tu existes ? lui écrire un mot ?... et l’Olympe sait que tu vas en écrire des mots, des lettres, écrabouillées et jetées, d’autres gardées parce qu’
on ne sait jamais. au final, tu l’as fait, Sasha, près d'un an plus tard. tu t’es planté comme un piquet devant lui, avec plusieurs lettres d’amour lui étant adressées et… t’as pris le râteau de ta vie.
2011 — tu te remets d’Ace Ackerley, bien que tu avais demandé plusieurs fois à Aphrodite
pourquoi ?! sans réponse de sa part, bien sûr. c’est à ce moment-là que tu t’es véritablement laissé happer par l’idée d’être un héros. toujours du piano et un peu de surf, mais tu vivais malgré tout pour ta lance et tes dagues, Sasha. on sait jamais, peut-être qu’un jour, on va casser du monstre ; et au fond, t’aimerais bien.
2012 - 2013 — d’aussi loin que tu t’en souviens, depuis ton arrivée Vega est ta meilleure amie et tu as toujours hang out avec elle, tout comme tu as souvent passé du temps avec ses adelphes, mais tu n’as jamais vraiment vu Lyra… jusqu’à cet été-là. c’est elle qui l’a dit sous les perséides pendant que tu cherchais désespérément tes mots, Sasha, Lyra t’a embrassé. c’était le début d’une première relation d'amour adolescent ; on s’imagine refaire le monde, que l’univers tourne autour de l’autre, on s’imagine se marier, avoir des enfants, vivre follement… même si vous avez pris le temps.
Nausikaa ouvre ses portes et c’est l’occasion d’appeler papa, de courir le long de l’Isthme comme si on était libre ; de visiter New-York avec sa main dans la tienne, même si Dionysos te regardait de travers après, ça en valait le coup. vous allez pouvoir refaire un noël entre Amouretti au grand complet et tu as grande hâte, Sasha. tu dois faire un truc avec V et Lyli avant de partir sauf que… Charles vous a fait une surprise, il arrive plus tôt à New-York pour aussi fêter l’anniversaire de Zach –c’est vrai qu’il en a fait pas mal tout seul– et tu laisses un mot, t’excusant.
tw: mention de décès violent.
tu aurais voulu la serrer plus longtemps dans tes bras. prendre le temps que tu pensais ne pas avoir. parce qu’elle n’est plus. tu es rentré en panique, Sasha, les genoux qui te lâchent. les monstres existent et ils tuent.
ils vous tuent. tu prends la claque de ta vie dans la gueule. vision trouble, palpitant éteint dans ta poitrine ; juste le vide. un gouffre aux allures de Tartare. son sourire disparu pour toujours.
2014 - 2015 — tw: auto-destruction et dégradation de soi, consommation de substances illicites, pensées suicidaires, mention de vulgarité.comme une sensation d’errer en plein champ des châtiments, tu voudrais piquer une tête dans le léthée… mais c’est plutôt dans la vodka et tout ce qui te passe sous la main. le déni n’a pas duré longtemps, la dépression et la colère se sont fait longues longues longues.
j'aurais dû être là. cette pensée t’obsède, Sasha, tu t’en veux à en crever, littéralement. vivre sans elle, ça te semble improbable, mais tu ris jaune de toi-même, incapable d’en finir réellement… c’est à petit feu que tu flambes la vie : alcools, drogues, les corps des autres. parce que t’es juste une coquille vide et t’es même pas certain de vouloir le combler ; t’en as plus rien à foutre de rien.
tellement que t’as insulté l’Oracle, Apollon et Chiron quand t’as été affecté à une mission avec Yeon. c’était
hors de question. finalement, on t’a traîné par la peau du cou, comme quand tu voulais aller
la chercher à l’élysée. t’avais pas la moindre idée de pourquoi
le destin vous avez choisi Yeon et toi, mais c’est probablement plus Aphrodite et Hestia qui ont fait en sorte que vous surviviez, même si ce n’est pas passé loin.
2016 — c’est la musique qui t’a sauvé –ta famille aussi ; tes proches– comme une catharsis. doucement tu as commencé à remonter la pente. entraînements qui reprennent, une drôle d’envie d’éclater l’Hydre de Lerne. le surf plus occasionnellement et le piano en plein centre de ton existence. le fil de ta vie, Sasha. en septembre, Charles te paye des cours à la
juilliard school, faisant en sorte que tu puisses avoir un emploi du temps viable pour les suivre et être à la colonie en même temps ; en sécurité malgré tout.
2017 — les aller-retours à juilliard sont rudes, heureusement que ce n’est pas tous les jours, mais ça en vaut le coup. puis il y a Yeon. pas spécialement bizarre, juste depuis qu’il va mieux, vous vous voyez beaucoup. des messages, des appels, des sorties et doucement, tu te rends compte que tu ne le regardes plus comme avant ; que son sourire déclenche ta tachycardie. c’est toi qui l’a dit, Sasha, soufflé comme un secret au coucher du soleil.
« je t’aime. » en haut du belvédère. le début de quelque chose qui semblait avoir été écrit avant vous,
votre histoire.
2018 — vingt-et-un ans, ça y est ; déjà. tu quittes la colonie, Sasha. promets de revenir voir tes adelphes dès que tu le peux. Nausikaa aussi tu l’abandonne un temps, prenant un studio à New-York de l’autre côté de Central Park ; c’est plus simple pour l’école. petit job au Starbucks faisant l’angle entre lexington avenue et la 85th street.
2019 - 2021 — tu aimes ce que tu fais, c’est fini au Starbucks, tu commences à donner des cours, Sasha. c’est qu’avant tu as fait des concerts ;
virtuose a déclaré le
Times. c’est magique avec Yeon, vous alternez entre son appartement à Nausikaa et ton studio à Manhattan. 2021 vient tout juste de commencer, allongé à ses côtés tu lui dis que tu voudrais vivre avec lui et que tu te fiches de devoir faire des allers-retours pour le travail.
« je veux que les exceptions ce soient les nuits et les matins sans toi, plus le contraire. »2022 - 2023 — vous avez vécu dans l’appartement de Yeon jusqu’à la fin de l’été 2022, ça commençait à sérieusement devenir exiguë. alternant entre NYC et Nausikaa pour le travail, profitant de ton temps libre pour voir ta famille, tes amis, Sasha ; profitant du temps avec lui surtout. c’est ton idée du bonheur et innocemment, tu la crois inébranlable.